Est-ce possible de ressusciter le Dodo, le symbole de l’Ile Maurice ? C’est le défi que tente de relever Colossal Biosciences, entreprise américaine de biotechnologie et de génie génétique. Au-delà de l’aspect symbolique de revoir un animal disparu depuis plus de 300 ans, les projets scientifiques de Colossal Biosciences nous poussent à nous intéresser aux causes des extinctions des espèces animales et végétales.
Quelques données sur l’extinction des espèces animales et végétales
Il existe de nombreuses données sur la disparition et les menaces de disparitions des espèces animales et végétales. Ce qu’il faut retenir c’est que l’activité humaine a fortement accéléré ce phénomène puisque l’Homme est le principal responsable de la destruction des habitats, de la pollution des océans et des émissions de gaz à effet de serre.
Selon l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN), 28% de toutes les espèces sont menacées d’extinction. Si nous allons dans le détail de ce chiffre, les ordres de grandeurs de certaines espèces seront plus parlants pour le grand public : 41% de tous les amphibiens ; 27% de tous les mammifères ; 34% de tous conifères ; 37% de tous les requins et raies ; 36% de tous les récifs coraliens ; et bien d’autres espèces encore.
Dans un communiqué du 6 mai 2019 de la Plateforme Intergouvernementale Scientifique et Politique sur la Biodiversité et les Services Ecosystémiques (IPBES), le chiffre de 1 000 000 d’espèces menacées est évoqué. Les scientifiques ayant travaillé sur ce rapport, indiquent que 40% des amphibiens, 33% des récifs coraliens et plus de 30% des mammifères sont menacés d’extinction.
La disparition d’une espèce n’est évidemment pas sans conséquences dans une écosystème. Nous connaissons tous l’utilité dans la nature d’avoir des prédateurs et des proies. Même chose pour les végétaux qui ont à leur dimension, une utilité et une importance dans l’écosystème.
Il faut bien entendu prévenir le phénomène en agissant dès à présent pour protéger les espèces en voie de disparition mais la société Colossal Biosciences tente elle, d’intervenir sur l’après extinction par ce qu’elle appelle la dé-extinction c’est-à-dire resusciter les animaux disparus.
L’exemple du Dodo de l’Ile Maurice
C’est par la combinaison de la biotechnologie et de la génie génétique que la société américaine va tenter de faire renaître des espèces éteintes. C’est notamment par la technique du CRISPR c’est-à-dire par la découpe de brins d’ADN permettant ainsi d’avoir une nouvelle édition du génome et donc un ADN reprogrammé. Prenons l’exemple du Dodo pour mieux comprendre le procédé.
Ce symbole de l’Ile Maurice est une espèce endémique dont sa disparition complète est estimée aux alentours de 1690. La cause de son extinction est bien connue : l’arrivée de l’Homme vers 1500. Les hommes ne sont pas venus seuls, ils ont amené avec eux des rats, des chèvres, des porcs, des cerfs et des macaques. Ces animaux ont alors pris place sur l’île et ont tous joué un rôle de décimation à l’encontre de l’habitant historique de l’Ile Maurice, le Dodo.
Nous pouvons schématiser le travail de clonage des scientifiques de Colossal Biosciences de la manière suivante :
- Etape n°1 – Obtenir l’ADN du Dodo : Pour cette première étape, les scientifiques doivent séquencer le génome du Dodo en utilisant l’ADN du Dodo retrouvé sur ses ossements conservés au Musée d’Histoire Naturelle du Danemark.
- Etape n°2 – Le choix de l’animal pour le clonage : Il s’agit de trouver son parent le plus proche génétiquement avec lequel se fera le métissage. Le choix s’est porté sur le pigeon Nicobar, une espèce également en voie de disparition.
- Etape n°3 – Comprendre le schéma de reproduction : Contrairement aux mammifères, le schéma de reproduction des oiseaux est différent et par voie de conséquence, son clonage aussi. Pour relever ce nouveau défi, les équipes de Colossal Biosciences vont utiliser les cellules primordiales germinales qui sont présentes dans l’œuf. 24 heures après la ponte, ces cellules migrent en dehors de l’embryon pour ensuite, devenir des spermatozoïdes ou des ovules. L’objectif est donc de reprogrammer l’ADN de cette cellule présente dans l’œuf.
- Etape n°4 – Intégrer l’ADN reprogrammé : Nous arrivons à l’étape technique de l’édition du génome et de l’injection de l’ADN reprogrammé. Au moment où les cellules primordiales germinales sont en train de migrer, les scientifiques introduisent une aiguille pour les saisir. En utilisant la méthode CRISPR, son ADN est reprogrammé avec intégration de l’édition génomique avec des gènes du Dodo. Cette cellule reprogrammée est ensuite réintégrée dans l’œuf.
- Etape n°5 – la renaissance du Dodo : La dernière étape est l’éclosion de l’œuf. Les premiers oiseaux ne seront pas identiques au Dodo mais ressemblerons plutôt à un métisse Nicobar-Dodo. Les scientifiques comptent surtout sur les générations futures pour avoir des oisillons avec un apparence proche du Dodo authentique.
Pour conclure :
Le Dodo est le dernier projet annoncé après ceux du mammouth laineux et du thylacine dit le tigre de Tasmanie. L’une des motivations qui justifie toutes ces recherches est le « réensauvagement » qui serait pleinement bénéfique à l’écosystème. A nous également de faire le nécessaire pour épargner les espèces existantes.